Travailler avec l’intelligence artificielle : le prochain enjeu des managers

Une enquête menée par Accenture Strategy a révélé qu’une majorité de collaborateurs reçoivent favorablement les technologies digitales. Une donnée intéressante qui nous indique que les collaborateurs qui pensent que le digital améliorera leurs perspectives d’emploi seraient quatre fois plus nombreux que ceux qui pensent qu’il va les diminuer.

 

Certaines fonctions sont plus sujettes à l’intégration de l’intelligence artificielle quand d’autres semblent au premier regard plus fermées, notamment lorsqu’elles imposent un grand nombre d’interactions humaines. Nous pouvons bien évidemment citer la fonction managériale avec ses différentes missions : prise de décision, encadrement et motivation des équipes, et définition puis exécution d’une vision stratégique. Les managers, qui seront chargés de mettre en œuvre cette révolution, ont le sentiment d’être pris dans un piège où il se verront obligé d’évoluer avec les collaborateurs. Selon une récente analyse, ils se montrent d’ailleurs comme les plus préoccupés par ces bouleversements technologiques. 

 

L’intelligence artificielle libère des tâches chronophages 

 

Il faudrait donner une vision plus réaliste de l’IA afin de diminuer considérablement le sentiment de méfiance éprouvé par la population et plus particulièrement les travailleurs. Cette vision consiste à montrer qu’il existe des synergies entre l’homme et la machine et qu’elles nous permettraient de créer plus de valeur au travail.  

 

Si l’on analyse le quotidien d’un manager, une multitude de tâches accaparent leurs temps. Or, ces tâches pourraient être automatisées comme par exemple : la planification et la coordination des travaux, le suivi et le reporting des projets ou encore le respect des normes et des règlements. Ces tâches chronophages peuvent être « données » aux intelligences artificielles, ce qui libèrera du temps aux managers qui pourront se focaliser sur des activités nécessitant des compétences humaines comme du raisonnement, du jugement personnel et des capacités de réflexion profondes auprès des clients ou des collaborateurs. Les managers auront également plus de temps alloué à la créativité et à l’innovation des équipes, sources de performance des entreprises. 

 

Avec l’IA, les managers peuvent devenir plus analytiques en intégrant une multitude de données à leur disposition et en les analysant par rapport aux problématiques qui se présentent à eux. Ainsi, ils prendront des décisions compte tenu de l’ensemble des données. Le manager pourra également agir en mode préventif ou prédictif grâce aux données. En effet, de nombreux algorithmes apparaissent petit à petit dans la prise décisionL’IA, lorsqu’elle a à disposition de nombreuses données, est capable de prendre des décisions permettant de confirmer une action, d’éviter un incident ou encore d’optimiser un mode de fonctionnement. 

 

À première vue, l’idée de confier l’encadrement et la motivation des équipes parait une idée folle. Pourtant, les intelligences artificielles, même si cela reste expérimental aujourd’hui, pourront fournir des services liés à l’encadrement des équipes. Ces services doivent toutefois être acceptés par les salariés qui se verront, d’une certaine façon analysés par des algorithmes mais les managers doivent toujours garder un œil sur ce que conseille la technologie. L’Homme doit toujours avoir un regard critique.  

 

Malgré ces perspectives intéressantesl’enquête révèle en France que 56 % des managers interrogés ne sont pas sûrs de détenir les compétences nécessaires pour exceller dans leur fonction de manager dans les cinq prochaines annéesCette réticence pourrait s’expliquer par le manque de confiance dans la technologieEn effet, seulement 13% des managers français se fieraient entièrement aux conseils donnés par les intelligences artificielles. Ce chiffre atteint 50% auprès des cadres dirigeants. 

 

À la vue de l’ensemble de ces éléments, le potentiel de l’IA apparaît clairement notamment pour les tâches chronophages des managers qui seront remplacés par l’IA ou simplement soutenus dans la prise de décision.  

 

Le manager doit développer de nouvelles compétences 

 

Intégrer des intelligences artificielles constitue une réelle mutation qui impacte l’ensemble des processus de l’entreprise en modifiant la manière de communiquer, d’interagir et donc de travailler.  

 

Les entreprises doivent donc être proactives dans cette démarche car elles doivent casser cette méfiance face à la technologie de la part de l’ensemble des collaborateurs et surtout des managers. Elles devront introduire et former à ces systèmes mais également encourager les expérimentations afin que la technologie s’ajuste aux équipes et aux processus. Le but est de montrer que l’on ne subit pas la transformation digitale mais plutôt qu’on la met en œuvre volontairement pour le bien de l’entreprise.  

 

Par conséquent, les managers devront gagner en compétences et il est important de définir quelles sont les compétences indispensables au manager de demain.  

Un tiers des managers pense que les compétences digitales et technologiques seront au cœur des exigences pour les cinq prochaines annéesPourtant, ils ne sont que 17% a cité la créativité, le développement personnel, l’expérimentation, le coaching ou encore la maitrise des réseaux sociaux comme des compétences essentielles au manager. En effet, l’arrivée de la technologie n’est pas synonyme de la disparition des qualités interpersonnelles et créatives… Elles resteront un enjeu majeur pour les managers car ils devront garder les compétences de motivation et de gestion des équipes moins performantes, moins structurées et ils devront être capables de garder le contrôle sur les évènements en permanence. Ils ne doivent donc pas être dépassés par la technologie.  

 

Le point essentiel sera donc de travailler la complémentarité entre les compétences interpersonnelles et les compétences technologiques liées à l’IA, car il faudra collaborer avec elle tout en gardant un esprit critique vis-à-vis de ses résultats. C’est dans ce cadre là que l’on parlera de manager augmenté, plutôt que remplacé par l’IA. Encadrer un groupe et le motiver resteront des enjeux majeurs pour les managers, l’IA n’étant pas capable de le réaliser pleinement et de façon optimale car elle ne maitrise pas l’écoute attentive ni même l’empathie et la bienveillance, traits de caractère propres à l’être humain.  

 

Les managers pourront collaborer avec l’IA et ils en tireront des bénéfices certains quotidiennement. En effet, l’IA a une force d’analyse des algorithmes en décryptant des quantités astronomiques de données. Les managers pourront ainsi confirmer leurs décisions au travers de ces analyses ou également mieux percevoir des signaux négatifs de la part de leurs équipes. Le plus important pour que la collaboration fonctionne, est de toujours garder une image critique des résultats de l’IA Le manager devra toujours développer une vision stratégique, une ligne de conduite qui lui est propre et réagir en conséquence avec l’aide de l’intelligence artificielle. C’est ce qui le distingue de l’intelligence artificielle.  

 

Ce que l’IA remplacera difficilement : l’élaboration d’une vision stratégique 

 

Les activités liées au leadership sont les plus protégées de l’emprise de l’IA notamment dans le cas de la définition et de l’exécution d’une vision stratégique. Il y a deux types de visions : 

 

  • « Personnality oriented » ce qui signifie que la vision est indissociable de la personnalité du leader, c’est notamment le cas des grands leaders emblématiques que sont Steve Jobs, Elon Musk, Bill Gates etc. Cette vision n’est pas modélisable par un algorithme ou une quelconque intelligence.  
  • La deuxième vision prend appui sur des critères plus rationnels à savoir des résultats financiers, comme par exemple l’optimisation du chiffre d’affaires. Cette vision est par opposition à la première, plus modélisable et à termes elle risque d’être absorbée partiellement ou totalement par l’IA. 

 

Pour conclure 

 

On entend souvent parler des nouveaux métiers créés par l’arrivée des nouvelles technologies, mais il est indispensable de repenser nos fonctions et les compétences associées. Elles ne nous donneront pas plus de capacités, mais elles nous rendront plus efficaces car elles nous permettront d’aller à l’essentiel par rapport à nos objectifs. La réussite d’une telle intégration reste le contrôle humain. Les directions d’entreprise sont généralement plus optimistes que leurs managers à l’arrivée de telles technologies, le défi reste alors de montrer de former ces derniers à ces technologies en leur montrant leurs avantages et leur périmètre d’action.